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L’idée poétique — fil conducteur et composant principal de la nouveauté de ce film —
consiste à transposer tout le parcours de saint Paul dans le contexte contemporain.
Pourquoi ai-je l’intention de transcrire ce parcours terrestre dans notre durée présente ? Tout
simplement pour rendre, cinématographiquement, de la façon la plus directe et violente,
l’impression, la conviction de son actualité. En définitive, pour dire au spectateur, d’une
manière explicite, sans même l’obliger à réfléchir, que « saint Paul est ici, aujourd’hui, parmi
nous », et qu’il l’est presque physiquement, matériellement : que c’est à notre société qu’il
s’adresse, que c’est sur notre société qu’il pleure, que c’est notre société qu’il aime, menace et
pardonne, agresse et embrasse tendrement.
Aucun désert ne sera jamais plus désert qu’une maison, une place, une rue où vivent les
hommes mille neuf cent soixante-dix ans après Jésus-Christ. Ici, c’est la solitude. Coude à
coude avec ton voisin qui s’habille dans les mêmes grands magasins que toi, fréquente les
mêmes boutiques que toi, lit les mêmes journaux que toi, regarde la même télévision que toi,
c’est le silence. Il n’y a pas d’autre métaphore du désert que la vie quotidienne.
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Pier Paolo Pasolini (Bologne, 1922 — Ostie, 1975)
Poète (Les cendres de Gramsci, Poésie en forme de rose), romancier (Pétrole), cinéaste (Théorème, L’évangile selon saint Matthieu), critique, traducteur.
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